« Quand on fait descendre la température dans la journée, le soir il faut relancer très fort et donc au final ça consomme plus ! »

mis à jour en cours : mise en température de 2 semaines (P+C 3.4.6.0)

Aujourd’hui, je vous propose une petite dissertation. Vous aurez 4 heures pour répondre 😀

Le sujet en est le suivant : il y a-t-il ou non intérêt à passer le chauffage en mode réduit durant les périodes de temps qui ne nécessitent pas une température de confort élevée ou, comme l’indique l’aphorisme populaire cité dans le titre, est-ce inutile ?

La surprise

Figurez-vous que ce n’est pas si évident que cela, et que tout dépend du type de bâtiment sherlock myopera smiley

Si l’on regarde les résultats des simulations, sur une semaine d’hiver, ci-dessous, on constate qu’une réduction de consigne est efficace pour un bâtiment dispendieux en énergie (- 27 % de consommation) mais presque contre-productive pour un bâtiment très-basse-énergie (- 3 %).

comparaison_passifpaspassifconsignereduite

Avant de se demander pourquoi cela ne marche pas dans un bâtiment passif, posons-nous la question de pourquoi c’est efficace dans un bâtiment plus classique.

Le plus simple est de faire une analogie avec la conduite automobile. En roulant doucement (la fameuse éco-conduite !), on met plus de temps à parcourir un trajet donné mais on fait une économie conséquente de carburant. Remplacez la mesure de la vitesse par la consigne de chauffe, la consommation de carburant par celle d’énergie nécessaire au chauffage, et vous voilà au fait du pourquoi la réduction de consigne est efficace.

Mais alors qu’est ce qui explique que l’on ne retrouve-t-on pas cette économie dans un bâtiment économe ?

Hé bien, tout simplement pour la même raison qui fait que vous consommez plus de carburant en ville que sur route : vous ne cessez d’accélérer, freiner et ré-accélérer.

Reprenons notre simulation mais cette fois-ci intéressons-nous aux appels de puissance d’une seule des zones, heure par heure, associés aux deux bâtiments équipés de la même double consigne 16 °C et 19 °C :

appels_puissance_passif_paspassifappels_puissance_passifappels_puissance_paspassif

Il apparaît 3 zones sur le graphique :
– la première correspond à une puissance de base permettant le maintien à 16 °C (➊ : P < Q1),
– la seconde est matérialisée par des pics de puissance pour assurer le passage de la consigne basse à la consigne haute (➋ : P > Q2),
– la dernière rend compte d’une puissance intermédiaire pour contenir les précieux 19 °C (➌ : Q < P < Q2).

La première observation concerne les pics de puissance : dans les deux cas, ils sont en effet du même ordre de grandeur, tout du moins en début de cycle. Quel que soit le bâtiment, il va falloir lutter contre son inertie, indépendante de l’isolation, pour le faire monter en température. En cours de cycle, les pics déclinent dans le bâtiment passif, tout simplement parce que les masses thermiques n’ont pas eu le temps de se décharger entre deux consignes.

En revanche, la puissance de base et la puissance intermédiaire diffèrent. Un bâtiment passif exige moins de puissance pour compenser les déperditions plus faibles que celle d’un bâtiment énergivore. Rien d’étonnant, c’est même l’effet principal recherché ! idea myopera smiley

Cela se manifeste notamment par l’écart entre le pic de puissance maximale et la puissance de base (cf. ce commentaire). Quand elle est d’un facteur 6 pour un bâtiment classique, elle est d’un facteur 22 pour le bâtiment passif. Sur un même temps, il faut donc 22 fois plus d’énergie pour faire passer mon bâtiment très basse-énergie de 16 à 19 °C que pour le maintenir à 16 °C (ou à 19 si on se permet une approximation).

Notons enfin que quand l’écart entre puissance de base et puissance intermédiaire est de 100 % dans le cas du bâtiment « conventionnel », il est de 200 % pour le bâtiment très-basse-énergie. Cela explique que la moindre augmentation de consigne dans ce dernier type de bâtiment soit immédiatement sanctionné par une augmentation relative de la facture fort conséquente (plus près de 20 % que des 7 % des publicités).

Regardons maintenant la répartition entre ces 3 états de puissance :

Cela ne pourrait être plus flagrant ! Alors que l’épave énergétique met toute son énergie (ou dit avec moins d’emphase : 60 %) à maintenir les consignes de température, le bâtiment passif s’épuise (presque 60 % aussi) lui à assurer la montée de 3 °C. S’abstenir des pics de puissance qui permettent les montées en température est donc une voie sûre pour améliorer encore la consommation de ce dernier.

Ma maison passive est comme une voiture qui consommerait presque rien en carburant pour conserver sa vitesse mais en userait autant voire plus en accélérations.

Remarquons, enfin, que le maintien de la consigne à 16 °C ne consomme presque pas d’énergie* : comme une voiture profitant de son inertie, le bâtiment le moins énergivore se contente de laisser tomber la température depuis la consigne haute sans plus d’effort que celui nécessaire au retour à la consigne haute.

* les quelques pourcentages affichés correspondent à une « anomalie » dans la méthode de détection utilisée.

Finalement, l’expression populaire est effectivement fausse… ou alors elle était en avance sur son temps et parlait déjà de bâtiments passifs !

C’est quand qu’on va où ?

On ne peut clore le sujet sans chercher à mieux définir le moment de la bascule ! ⭐

Pour qu’il y ait économie, il faut que l’énergie dépensée durant le scénario à double consigne soit inférieur à celle dépensée pour maintenir la consigne haute. Cela signifie donc que le cumul des énergies des 3 zones décrites plus haut doit être inférieure à celle du maintien monotone à 19 °C.

Imaginons que nous n’ayons réalisé qu’une simulation avec une réduction de consigne, pouvions-nous appréhender le résultat précédent par avance ?

Oui, il nous suffit de reprendre les deux derniers résultats et, non pas de les comparer entre eux, mais avec ce que nous pouvons deviner (si nous nous refusons à une nouvelle simulation) de l’énergie nécessaire au maintien de 19°C.

Pour cela, nous avons estimé — choix critique attention — la puissance moyenne pour assurer la consigne haute en calculant la moyenne des zones à 19 °C (176 et 592 resp. pour le passif et le non passif). Dès lors, en multipliant cette valeur par la durée, nous obtenons une estimation de l’énergie nécessaire pour avoir 19°C de façon monotone.

bascule_passif&consignereduite

Nous retrouvons une baisse du besoin estimée à 13 % (proche du 20 % trouvé toutes zones confondues), grâce à la réduction de consigne, pour le bâtiment énergivore.

En revanche pour le bâtiment passif, cette méthode fait apparaître une hausse des besoins de 5 % – du fait de la réduction – qui doit nous alerter.

En procédant ainsi, on constate qu’il est possible, sans plus de simulation, d’anticiper sur le résultat. Si la méthode décrite ici — qui part sur des hypothèses favorables à la réduction de consigne pour un bâtiment économe — n’annonce pas une réduction conséquente, il faut, par de nouvelles simulations, tester l’efficacité de la réduction.

Ce que nous venons de réaliser par le calcul, on peut également en avoir l’intuition visuellement. Imaginez que la graphique de puissance soit comme une photo instantanée d’un enchainement de vagues. Lorsque le calme va revenir, que les pics vont se vider dans les creux, le niveau va-t-il monter ou descendre par rapport au plateau intermédiaire ?

S’il vous parait évident qu’il va baisser, pas de doute, la réduction sera efficace. Mais au moindre doute sur le niveau final, vérifiez par le calcul l’efficacité de la réduction sur votre bâti passif (vous pouvez aussi essayer ce calcul très simple).

Conclusions ?

Cette démonstration n’a pas vocation à prouver que la réduction de consigne est inutile dans tous les bâtiments passifs. En revanche, elle démontre qu’il y a des situations, pas si rares, où dans ce type de bâtiment, mieux vaut laisser le chauffage allumé en continu plutôt que de se risquer à des relances qui, si dans un bâtiment classique ont peu d’impacts, ici peuvent faire basculer sur une surconsommation par rapport à une consigne haute continue.

Quelles sont ces situations ? Énoncer des généralités dans ce domaine est un art difficile mais on voit bien que ce qui est marquant c’est à la fois l’allure des pics de puissance et leurs fréquences.

Un bâtiment passif soumis à des sauts de consigne rapprochés fera de fréquents appels de puissance et donc sera entraîné, sans doute, à sur-consommer.

Plus ce bâtiment sera inerte et plus le pic sera haut et plus également nous irons vers une surconsommation.

En revanche, un bâtiment passif avec peu d’inertie et soumis à des sollicitations espacées trouvera des économies dans les réductions de consigne.

Et qu’en pense le Dr Feist ?

Le Dr Feist, inventeur du standard Passivhaus, fait, comme souvent, preuve de pragmatisme et de goût pour la simplicité. Il indique en effet, que dans un bâtiment qui consomme déjà très peu, il y a vraiment très peu d’économies à attendre en valeur absolue, même si en valeur relative, le pourcentage semble élevé.

Imaginons par exemple, un bâtiment passif dont les charges de chauffage sont de 150 €/an. Économisez 25% – ce qui est énorme – équivaut à 37,50 €, pas de quoi fouetter un chat. Dans un même temps surdimensionner le chauffage pour permettre les relances risque fort de coûter bien plus cher en investissement comme à l’usage (entretien p. ex.).

41 commentaires sur “« Quand on fait descendre la température dans la journée, le soir il faut relancer très fort et donc au final ça consomme plus ! »

  1. Bonjour,

    Je lis vos brèves avec un grand intérêt, mais j'avoue avoir du mal à vous suivre sur cette réflexion et je compte comprendre.

    Le premier graphe comparant un bâtiment classique et un bâtiment passif, l'un avec un ralenti et l'autre non est assez surprenant. L'énergie consommée pour un passage de 16°C à 19°C est liée au niveau d'inertie et non au niveau d'isolation (même si ce dernier à un impact qui me parait négligeable, c'est peut être ici que je fais une erreur. Ainsi les énergies consommées dans le 2 cas devraient être assez proches. Le 2e graphe semble demontré cette analyse. Le pic est la puissance, l'intégrale de la puissance sur le temps est l'énergie. Lorsque je regarde la surface du 2e , 3e et 4e pic, J'ai une impression d'aires équivalentes.

    Lorsque vous écrivez "Il faut donc 15 fois plus d'énergie pour faire passer mon bâtiment très basse-énergie de 16 à 19°C que pour le maintenir à 16°C" Au vu du 2e graphe, je remplacerais le mot énergie par puissance.

    Je pense qu'il me manque quelques informations pour alimenter mon raisonnement, j'ai donc une petite question : A quel paramètre physique entrant dans l'équation du bilan thermique doit-on cette rehausse de consommation ?Merci pour cet article et pour le partage de la réflexion sur ces nouveaux bâtiments sur lesquels nos habitudes de raisonnement changent quelques fois totalement.

  2. Merci pour votre intérêt Blayac ! 🙂

    Sachez tout d'abord que depuis votre commentaire, j'ai repris un peu l'étude avec un cycle plus répétitif et un graphique de puissances plus lisible avec des pics de même largeur quel que soit le bâtiment.

    On est bien d'accord, les pics de puissance sont liés à l'inertie pas à l'isolation, c'est bien ce que j'écris dans l'article ci-dessus. En tout cas, en début de cycle, parce qu'ici les horaires de consignes étant serrés, le bâtiment passif ne décharge jamais totalement son inertie et prend donc de l'avance pour les montées en température par rapport à l'autre bâtiment.

    Je suis également d'accord avec votre remarque sur puissance et énergie, c'est pour quoi je parle d'une énergie consommée sur un même temps.

    Originally posted by Blayac:

    Lorsque je regarde la surface du 2e , 3e et 4e pic, J'ai une impression d'aires équivalentes.

    Oui c'est, grosso-modo, le cas mais c'est la valeur relative qui importe : les surfaces de zones de pics sont importantes par rapport à la surface totale pour le bâtiment passif. Elles représentent presque 60% du tout, tout de même,contre 40% pour le bâtiment plus classique. Il y a donc bien bascule, entre ces deux cas, au niveau de la cause des consommations de chauffage, d'où la surprise de voir que réduire la consigne de chauffage peut augmenter la consommation globale 😮

  3. Bonjour,

    Je me demande toujours quelles sont les raisons de cette surconsommation, afin de construire des bâtiments passifs qui ne consomment pas plus lorsque l'on fait des réduits journaliers.

    Je vais ainsi m'avancer sur quelques suppositions :
    1. le besoin diminue mais c'est la consommation qui augmente sans doute du au mauvais rendement de la production de chaleur lors des relances,
    2. la température de consigne (de 19°C) doit être dépassée pour une montée en température rapide et donc crée une surconsommation,
    3. une sur-isolation (par l'extérieur) associe une meilleure inertie est donc une régulation plus difficile,enfin on retombe sur la 2e supposition.

    Autre réflexion, si un bâtiment passif consomme plus lorsque l'on fait des ralentis journaliers et que ce n'est plus le cas lors de longue durée de ralenti alors l'économie d'énergie dépend du temps. Alors est-ce que lorsque l'on s'absente un weekend faut-il changer la température de consigne ?Enfin, à faire décanter…Merci

  4. Ah… Comment expliquer en une phrase ce qu'il m'a fallu tout un article (largement amélioré depuis votre premier commentaire !) à décrire ? 🙂

    D'abord, ce n'est qu'un souci de besoins de chauffage, nul… besoin donc… de se soucier de rendement des équipements.Cela n'arrive que parce qu'il y a une combinaison de 3 paramètres :
    – le souci d'une réponse rapide à la demande d'un confort supérieur,
    – une fréquence élevée de sollicitations,
    – de très faibles déperditions.

    Je ne parle pas d'inertie qui a un rôle complexe à jouer puisqu'à la fois elle tend à diminuer (baisse lente de la température) et augmenter le phénomène (pics plus élevés), et ce sans symétrie évidente.Parce qu'on demande de passer rapidement et fréquemment à la consigne haute, les pics de puissance sont importants par rapport à la faible puissance nécessaire en base pour pallier aux très faibles déperditions.

    Dès lors, il y a trois moyens — pas forcément intelligents :devil: — d'éviter les surconsommations :
    – supporter une montée en température lente en sous-dimensionnant,
    – solliciter moins souvent (voire pas du tout et hop on est à la consigne monotone),
    – isoler moins.

    Il n'y a pas même de dépassement de consigne dans l'étude présentée. Si vous en supposez une, comme si vous supposez des équipements, vous démultipliez le phénomène mais ce n'est pas la cause initiale.

    Réduction de la consigne de chauffage

    Quant aux réductions longues, oui elles sont économes, d'autant plus qu'on peut programmer une remontée lente.

  5. Merci Olivier pour cet article.

    C'est un excellent support que je me permets d'utiliser pour un examen de mes étudiants sur la thermique du bâtiment : leur faire toucher du doigt que la thermique est une science complexe, que les réflexes d'hier ne doivent pas être ceux de demain et qu'il faut arrêter de sortir des solutions toutes faites, comme on en voit des dizaines dans les projets autour de nous.

    J'aime bien comparer mon approche à la casserole d'eau qu'on utilise pour faire le thé : pour faire du thé, je mets de l'eau froide dans ma casserole et je la mène à ébullition. Si elle est déjà pleine d'eau tiède ? et bien je jette l'eau tiède et je remets de l'eau froide : chaque projet doit être appréhender comme un territoire vierge, sans préjugé…

    Deux remarques néanmoins à votre analyse, à destination des néophytes :
    1/ on n'installe jamais une puissance égale à 22 fois la puissance de maintien en température de confort ; le rendement des systèmes sont catastrophiques en dessous de 10% de la puissance nominale et le prix des systèmes augmente vite avec la puissance. La durée de relance est une variable du problème, à voir si on peut en trouver une qui permet de faire des économies.
    2/ En corollaire, on peut imaginer que la température de réduit n'est pas 16°C mais 18°C.

  6. Bonjour Olivier,
    C'est moi qui suit l'auteur du post précédent (mon nom a sauté pour une obscure raison). j'ai vu par ailleurs que vous reveniez sur me remarques dans une de vos réponses aux commentaires.
    Bonne année à vous,Cordialement

  7. Bonjour Bertaud,

    Je suis un peu déçu que ce soit vous, je croyais avoir hameçonné un nouveau lecteur :happy:
    Plus sérieusement, je suis ravi — et même flatté, j'avoue — que mon article puisse trouver une seconde vie sur des tables d'étudiants, merci :yes:

    Effectivement, j'ai déjà plus ou moins répondu, un peu plus haut dans les commentaires, à vos remarques mais pour autant elles n'en sont pas moins très pertinentes !

    À propos du facteur 22, il rend compte de l'écart entre le maximum des puissances maximales et la puissance moyenne de maintien à 16°C pour le bâtiment passif. Ce n'est donc pas ce qui sépare la puissance nominale de la puissance minimale. Ce maximum des puissances maximales n'existe que parce que le bâtiment est supposé livré froid* et réchauffé très vite (en quelques heures), sinon les puissances maximales moyennes sont plutôt 4 fois supérieures aux puissances minimales, ce qui est beaucoup plus atteignable. * tiens, encore un problème nouveau : quand et comment livrer des bâtis passifs ?

    Je ne veux pas donner l'impression de chipoter, vous avez raison, j'ai voulu démontrer ici ce phénomène de possible désuétude des consignes réduites dans le passif et je n'ai pas tenté de dimensionnement correct.:ko:

    Toujours est-il que vous évoquez quelque chose de passionnant : comment dimensionner le chauffage dans les bâtiments très-basse-énergie ? Là aussi, comme vous le dîtes, on a gardé de vieilles habitudes parfois totalement incohérentes dans les nouveaux bâtis. Il faudra vraiment que j'y revienne et d'évoquer comment on peut se voir proposer un poêle capable de ne couvrir que 5% du temps de chauffe à force de préconisation réflexes… si,si :zip:

  8. Merci pour votre article et votre blog.

    Je ne suis pas thermicien mais le sujet m’intéresse et j’essaye de comprendre 🙂

    Je travaille dans la domotique et je m’intéresse dans ce cadre beaucoup à la régulation du chauffage. Il est assez simple pour moi de définir automatiquement des nouvelles températures de consigne, de définir quand il faut chauffer, mais jusqu’à présent je n’utilise que des règles « basiques » : mode jour quand la personne est présente & réveillée ou 1h avant retour à la maison ou réveil et sinon mode éco avec 3° d’écart entre les 2 consignes, hors gel en cas d’absence prolongée) mais j’aimerais avoir quelque chose de plus « intelligent », basé sur des règles calculées plus que sur « on dit que ».

    Je me pose 3 questions, en partie posées par Bertaud :
    – Dans l’exemple de l’article quelle était la durée d’absence ? J’imagine quand même que si le bâtiment est inoccupé pendant 1 semaine, il sera quand même plus intéressant d’avoir une double consigne ?
    – Un écart de 3° dans les consignes, n’est pas probant dans le cas du bâtiment passif. Est-ce qu’1° d’écart aurait apporté une économie ? Est-ce que la température extérieure n’est pas un facteur à prendre en compte ?
    – J’ai fini mes études depuis maintenant quelque temps mais je garde en tête la formule « rien ne se perd tout se transforme ». Quel phénomène explique que la double consigne soit plus énergivore ? Vous parlez d’inertie mais, l’énergie pourquoi l’énergie nécessaire à faire remonter en température les murs est-elle plus importante que l’énergie récupérée des murs lors de la baisse de température ?

    Merci et continuez vos articles!

    1. Bonjour Alexis,

      Je suis très heureux que vous ne soyez pas thermicien ! J’ai, en effet, l’espoir que ce blog puisse intéresser d’autres lecteurs que les thermiciens 🙂

      Ce que je souhaite montrer ici — quel que soit le public — c’est qu’il y a bien plus de subtilité, de caractère organique, qu’il n’y parait dans le cycle de vie d’un bâtiment. Et que croire que tout se résume au choix de la bonne technologie est une nigauderie sans nom. Je m’efforce d’expliquer le peu que je sais avec le plus de clarté possible mais aussi d’approfondir les sujets plutôt que d’ânonner des généralités. Parce que ça, y’a déjà du monde qui sait faire hihi 🙂

      Mais, revenons-en à vos questions. En fait, ce que vous demandez, c’est s’il est possible d’avoir l’intuition de l’efficacité de la réduction de la consigne avec très peu de données. Ce n’est pas évident mais on peut s’essayer à une approximation grossière, à partir de la seule connaissance de la puissance installée de chauffage et de la connaissance des parois internes (pour évaluer l’inertie).

      En ce qui concerne la puissance de chauffage, un bâtiment passif se contentera de 10 W/m² là où une maison RT2012 demander 40 W/m². Il s’agit là de la puissance maximale qui peut être appelée au plus froid de l’hiver, sans apports gratuits, dans une région pas trop froide. Mais ces chiffres peuvent varier très fortement si l’on prévoit des réduction de chauffage, d’autant plus que l’inertie du bâtiment sera forte et que l’on ne supportera pas d’attendre après de lentes montées en température.

      Reprenons nos 4 bâtiments (50m²) de l’article : l’un est passif, l’autre simplement RT2012, certains ont une consigne de chauffage monotone, d’autres admettent une réduction nocturne de la consigne (10h/nuit).

      Imaginons qu’il y ait, en son sein, 25 m² de cloisons lourdes (20 cm de béton). L’inertie de cette paroi va être de 2 950 Wh/K (cf. Wall-T). Finalement, l’air étant très léger, c’est cette inertie-là qui va poser problème.

      En effet, quand mes parois vont passer de 19 à 16°C, c’est 8 850 Wh (= 2 950 x 3) qui vont leur manquer, ce n’est pas rien !

      Quand le chauffage va redémarrer, il va devoir combler ce manque pour que le confort soit atteint (de l’air chaud et des parois froides, brrrr).

      Si ma maison est passive, même au plus froid de l’hiver, 500 W seront ici suffisants pour la maintenir chaude. Mais, si mes parois ont perdus 8 850 Wh du fait d’une réduction de la consigne, il faudra que le chauffage fonctionne 18 h (= 8 850/500) pour les recharger. Dur, dur !

      Donc, si on prévoit un mode éco nocturne, on dimensionnera le chauffage pour ne pas attendre autant. Par ex., avec 3 500 W, l’attente ne sera plus que de 3 h, ouf !

      Je ne sais pas vous mais là, cela sent le lièvre planqué dans les fourrés. 500 W mais 18h pour recharger les parois, 3 500 W et plus que 3 h… un écart qui doit nous rendre méfiant…

      Poursuivons et cherchons l’économie prévisible sur la facture, si économie il y a.

      Nous avons 7 coupures de 10h dans cette semaine très froide. Le chauffage devra donc tout donner 7 fois par semaine pour recharger les parois internes soit leur fournir 7 x 8 850 = 61 950 Wh (on suppose, en revanche, que la nuit, il n’a pas le temps de s’allumer tant le bâtiment se refroidit doucement). Si nous n’avions pas réduit la consigne, il aurait fallu maintenir les, seulement, 500 W de chauffage durant 70h soit fournir 70 x 500 = 35 000 Wh.

      Ah mais, il n’y a pas d’économie, il y a surconsommation de 77% !

      Tout cela est bien approximatif et se situe au cœur de l’hiver mais il rend bien compte du même phénomène que celui décrit dans l’article.

      Maintenant si la réduction n’avait été que d’1°C, effectivement, il y aurait eu une économie à attendre (41%). Parce que l’énergie nécessaire au chauffage aurait été inférieure à celle au maintien à la consigne haute.

      Cette petite méthode rustre, on peut la décliner sur plusieurs cas pour se rendre compte de plusieurs comportements distincts.

      paroi interne cloison lourde surface : 50 m² inertie : 2 950 Wh/K
      PASSIF monotone PASSIF réduction PAS PASSIF monotone PAS PASSIF réduction
      Pchauff. (W) 500 3 500 2 000 4 000
      calories perdues par les parois de 19 à 16°C (Wh) 8 850 8 850 8 850 8 850
      temps de rechargement avec Pchauff. (h) 18 3 4 2
      nombres de coupure hiver avec refroidissement total 7 7
      Énergie nécessaire au réchauffage (Wh) 61 950 61 950
      Durée de chauffage durant la réduction nocturne (h) 10 10
      Énergie nécessaire au maintien de la consigne haute la nuit (Wh) 35 000 140 000
      économie d’énergie (Wh) -77% 56%
      paroi interne cloison légère surface : 50 m² inertie : 125 Wh/K
      PASSIF monotone PASSIF réduction PAS PASSIF monotone PAS PASSIF réduction
      Pchauff. (W) 500 500 2 000 2 000
      calories perdues par les parois de 19 à 16°C (Wh) 375 375 375 375
      temps de rechargement avec Pchauff. (h) 1 1 0 0
      nombres de coupure hiver avec refroidissement total 7 7
      Énergie nécessaire au réchauffage (Wh) 2 625 2 625
      Durée de chauffage durant la réduction nocturne (h) 10 10
      Énergie nécessaire au maintien de la consigne haute la nuit (Wh) 35 000 140 000
      économie d’énergie (Wh) 93% 98%

      On retrouve, avec cette méthode toute bête, ce que je signalais dans l’article. Alors que ma maison RT2012 profitait de la réduction de consigne même avec une inertie forte, la maison passive ne peut prétendre à une économie qu’avec une faible inertie. Moins l’hiver est froid et pire c’est puisque le maintien à la consigne haute ne coûte pas grand chose.

      En fait, vous pouvez faire varier, à l’envi, les intrants pour vérifier s’il y a ou non intérêt à un mode éco. Faire varier la puissance, revient à considérer un climat extérieur plus ou moins froid. Faire varier l’inertie modifie l’appétit de calories des parois internes refroidies.

      Vous pouvez tenter de refaire ce calcul, de votre côté, en utilisant la puissance installée + une évaluation de la puissance nécessaire au maintien d’une consigne unique (identique que si inertie faible). Si vous ne trouvez pas d’économie, alors c’est que la réduction n’aura pas d’intérêt même avec des conditions plus douces. Rappelons tout de suite que tout cela n’est vrai que pour les bâtiments déjà très économes en énergie. Essayer donc en mettant 5 000 W de puissance, vous verrez…

  9. Merci pour cette réponse très détaillée!
    Je pense que la difficulté que j’ai à comprendre les résultats vient du fait qu’en 10h le mur perd plus d’énergie en passant de 19° à 16° (8 850 Wh) qu’il n’en faut pour le maintenir à 19° (5 000 Wh). Instinctivement j’aurais pensé le contraire mais j’imagine que mes lacunes en thermique en sont la source.
    Si vous pouvez m’expliquer simplement ce phénomène je suis preneur. Si je pars de beaucoup trop loin, n’hésitez pas à me le dire et j’essaierais de partir de la base 😉

    1. D’abord, il faut dire que je suis parti du postulat que le mur intérieur se refroidissait entièrement de 19 à 16°C. Parce que c’est ce qu’on constate sur les simulations présentées. Mais on pourrait avoir tout un tas de cas hybrides où le mur n’a pas eu le temps de se refroidir entièrement, et cela pourrait modifier grandement la conclusion. 😕

      Mais restons sur le cas où la coupure est suffisamment longue pour que le mur se refroidisse. On peut alors user à nouveau de la métaphore automobile pour vous donner une explication simple du phénomène.

      Ma maison passive est comme un lourd camion super optimisé pour consommer très peu en vitesse de croisière (= un TER ?!). Disons qu’il consomme 5 l/100 km dès que le compteur se stabilise à une vitesse donnée. En revanche, comme il est très lourd, les accélérations sont très couteuses, disons 30 l/100 km pour passer de 50 à 90 km/h en 10 km.

      S’il a 100 km à parcourir sans jamais changer de régime, il consommera 5l de carburant et puis c’est tout.

      Mais si l’on imagine qu’il doive ralentir, en traversant un village par exemple, qu’il freine sur 5 km puis qu’il prenne 10 km pour revenir à 90 km/h alors il consommera 5 l/100 km sur 85 km, rien sur 5 km et 30 l/100 km sur 10 km soit 5/100 x 85 + 30/100 x 15 = 7,25 l de carburant.

      On voit bien qu’il a plus consommé. Cela est dû à plusieurs choses : sa forte masse, son extrême optimisation à allure monotone et l’impatience pour revenir à 90 km/h. Si un des paramètres change, la conclusion peut être très différente.

      Ce sont les mêmes paramètres pour le bâtiment : masse thermique, faibles déperditions et temps de modification de la température intérieure.

      Moralité : méfiez-vous de l’indolence thermique ! 🙂

  10. Merci encore pour ces explications.
    désolé encore si ma question est basique mais pourquoi cela consommerait plus de chauffer vite?
    Il y a quelque temps, je me suis amusé à comparer la quantité d’énergie nécessaire pour amener de l’eau froide jusqu’à 90° avec une plaque induction. Avant de faire ce test, je préférais toujours mettre ma plaque à 7 au lieu d’utiliser le mode booster parce que je pensais qu’effectivement cela consommait plus de chauffer vite.
    Cependant contrairement à mes attentes, les résultats étaient linéaires. Que je mette à 7, 8, 9 ou booster (entre 1000 et 2300W) il m’a fallu autant de kwh pour chauffer mon eau.
    Est-ce que mon test n’est pas représentatif des problématiques d’inertie des murs ou est-ce que mon expérience n’a pas été menée correctement et donc ma conclusion est inexacte?

  11. Ah mais si vous évoquez votre plaque à induction, on va changer de métaphore, passons en cuisine ! 🙂

    Maintenir une consigne dans une maison, c’est un peu comme faire un sabayon : il faut maintenir un bain-marie à une température de 65°C pendant plusieurs minutes.

    Pour amener à 65°C, vous pouvez faire comme vous voulez, soit tout doucement, soit avec la fonction boost, cela ne change rien, 1 l d’eau a besoin de ~ 65 mWh pour passer de 10 à 65 °C p. ex. C’est une question de patience, pas d’énergie !

    Mais quand vous laissez refroidir vos murs intérieurs dans la maison passive, c’est comme si vous jetiez l’eau du bain-marie (une partie…) pendant la préparation du sabayon. Pour ne pas le louper, vous allez devoir réchauffer rapidement l’eau nouvellement introduite.

    Si vous chauffez rapidement, cela vous évitera de louper le sabayon mais ce n’est pas cela qui fait consommer, c’est le fait de changer l’eau de cuisson ! C’est la même chose dans la maison, ce qui pose souci, ce n’est pas la puissance du chauffage mais le fait d’avoir laisser partir les calories du mur*.
    *C’est pour cela que quand il y a une très faible inertie, c’est comme s’il n’y avait pas de mur, ma maison passive jouit d’une économie grâce à la réduction du chauffage.

    Si on emmitouflait nos murs dans d’épaisses doudounes super isolantes juste avant la coupure de chauffage, il n’y aurait plus de problème ! 🙂

  12. Hello Olivier !
    Aaah, Je comprends pas bien ce qui se passe et ça me turlupine (au sens de « tourmenter » et non « d’agacer » ! Je précise, car j’apprécie bien trop ta quête de vérité et de discernement en toute chose de ce vaste et complexe monde).

    Il me semble -à moi aussi- que :
    – si « rien ne se perd, tout se transforme »,
    – si les 2 bâtis « passif inertiel » et « passif non inertiel » sont soumis aux mêmes conditions extérieures,
    – s’ils n’ont pas d’autres pertes que l’énergie s’échappant par leurs parois,
    – si leurs parois sont strictement de même conductance.
    Alors : alors le régime réduit devrait systématiquement générer une réduction d’énergie de chauffage dans la proportion du « poids de l’échelon de consigne réduite ».

    Il me semble …
    Car, dans l’énoncé ci-dessus, on a faire à une situation « parfaite » (aucun « parasite », aucun facteur d’influence divergent, aucune différence si ce n’est le niveau d’inertie).
    Donc, l’énergie entrante (le chauffage) n’a à compenser que l’énergie sortante.
    Si l’on se base sur l’énergie E = M.C.dT , et son « débit », la puissance P = E/t = M.C.dT/t, on ne devrait pas arriver au constat que tu fais, non ?

    L’analogie avec le « lourd camion » me gène (je sais qu’une analogie a ses limites, mais c’est quelques fois aux limites que se trouve l’explication …).
    Tu dis en gros :
    -« maison passive inertielle ~# lourd camion hyper sobre en régime de croisière ». Ok.
    -« lourd camion = accélération coûteuse ». Là, pas Ok avec toi.
    -« traversée de village ==> ralentissement avec freinage, puis ré-accélération ». Là, pas ok non plus avec toi.
    Tu fais intervenir des notions de rendements et des pertes supplémentaires (qui n’existent pas dans tes simulations).
    Une accélération est coûteuse si elle est concomitante à des pertes supplémentaires.
    Si on imagine le camion parfait (on raisonne en « besoin » et non en conso, comme pour le bâtiment), alors l’accélération d’une vitesse à une autre constitue rien d’autre qu’un stock d’énergie (deltaVxMasse).
    Si le « parcours » est parfait -par analogie au bâti passif ci-dessus- le camion ne freine pas (perte supplémentaire équivalente à une ouverture de fenêtre pour redescendre plus vite à la consigne réduite …) : il anticipe le besoin de ralentissement et profite de sa masse pour abaisser sa vitesse sans plus aucun recours à son moteur.
    Dans un système mécanique, c’est bien parce que changer de niveau de vitesse nécessite des efforts qui incluent des pertes complexes (proportionnelles et non-proportionnelles au deltaV), pertes non récupérables (par définition !) que changer d’état -dans la vraie vie !- est «  »coûteux » ».

    Donc, pour en revenir à tes résultats de simulation, n’y-aurait-il pas lieu de penser que ce qui fait que dans certains cas la consigne réduite est contre-efficace pourrait être du à une combinaison de causes non-perçues : des facteurs d’influences différents d’une situation à l’autre et dont on oublie ou méconnaît l’importance, un algorithme de modélisation aux limites de ses capacités à restituer la réalité physique ?

    En espérant que ma réflexion soit une invitation à relancer la tienne pour que ces résultats ne soient pas à considérer -pour moi !- comme un fait accompli troublant, mais au contraire : un fait éclairé d’une explication aussi rationnelle qu’évidente (… à mes yeux embrumés!).
    Merci encore pour ce lieu -de plus- d’échanges !
    Jean-Marie

  13. De mon coté, je poursuis mes expérimentations. J’ai travaillé sur un système plus simple: un cumulus électrique. Mon cumulus est équipé d’un module de commande qui me permet de décider quand alimenter le cumulus et qui mesure sa consommation / je mesure également la température de la pièce (ça s’est l’avantage de travailler dans la domotique;)). Contrairement à ce que l’on m’avait expliqué jusque là. Il est plus rentable de ne chauffer le ballon une fois par jour de manière intensive de 5 à 7h du matin (juste avant la douche) que de le laisser être chauffé régulièrement. Le gain est de l’ordre de 15%.
    Pourquoi le fonctionnement d’une maison serait-il différent?

    L’hiver approchant, je vais essayer de faire des mesures sur le chauffage. Mais le sujet est plus complexe (T° extérieure plus volatile, porte ouverte dans la maison, utilisation d’appareil électrique autre que le chauffage…).

  14. Ouha, Jean-Marie, décidément les commentaires courts c’est pas ton fort hihi 😉

    Je n’ai pas grand chose à dire, je crois que je me suis déjà pas mal répété. Il suffit de regarder ne serait-ce que le dernier graphique : parce qu’on veut une relance quasi-instantannée, dans le bâtiment correspondant à la courbe, les réductions ne permettent pas de rattraper ce qui est nécessaire aux relances à forte puissance. Point. Le problème de ta formule, c’est qu’elle n’est pas bien dynamique, tu ne tiens pas compte que, dans un cas, tes masses inertielles se vident de leurs calories alors que dans l’autre non (cf. ce commentaire).

    Alexis : il n’y a pas de généralité, certains bâtiments bénéficient des réductions d’autre pas, c’est bien le départ de mon article. Quant à votre cumulus, c’est d’autant plus compliqué que je ne sais pas de quelle consigne vous vous contentez.

  15. Merci Olivier pour ton retour.
    Oui je comprends bien que tu as tenté avec zèle de convaincre de la réalité du phénomène observé, et que tu vas pas reprendre tout à zéro…
    Et c’est vrai : elle est pas très dynamique ma formule, et probablement que tout est là.
    Bon, tant pis, à défaut de comprendre, je vais admettre car je sais ta science bien plus riche que la mienne !
    (Tu vois que si ! Si si, j’peux faire court ! 😉

    1. Houla, vil flatteur va ! 😉
      Ma science est bien pauvre mais il me semble que le phénomène est bien tangible, et mon analyse me laisse penser que c’est bien une problématique de synergie « subtile » entre faibles besoins et inertie.
      Je travaille, d’ailleurs, actuellement, sur un grand bâtiment pour lequel on retrouve pour partie ce comportement (la réduction de chauffage ne diminue les besoins que de 10% mais nécessite un important surdimensinnement).

  16. En fait, ce que j’ai du mal à saisir (mais je pars de loin, je ne suis pas thermicien), c’est que de ce que je comprends il n’y a qu’une seule formule de physique qui retranscrit les déperditions de chaleur. cette formule dépend de l’écart de température entre l’intérieur et l’extérieur + du volume + de l’isolation des parois. Si on part de cette formule, il n’y a donc aucune raison que même dans une maison passive il n’y ait pas d’intérêt d’une double consigne (écart de température plus faible = déperdition plus faible). Compte tenu de votre conclusion cela signifie que l’écart ne se situe pas au niveau de la déperdition de température mais plutôt au niveau de la phase de chauffe. Ce que vous appelez appel de puissance. Quelle formule de physique intervient ici? Vous m’aviez confirmé que chauffer 1L d’eau à pleine puissance ou en y allant plus doucement revenait à dépenser la même puissance (ce qui n’est pas le cas d’une voiture qui accélère), pourquoi cela est-il différent dans le bâtiment?

    Par contre, je comprends la problématique de surdimensionnement (je progresse avec mes petits moyens;)).

  17. A Olivier :
    Heureusement que le « vil flatteur » est suivi d’un sourire. 😉 + 😉
    Sinon je pourrai croire que reconnaître ses propres limites au regard de celles d’un autre jugées moins réduites serait synonyme de vernissage de l’idole ! 😉
    Idole, dis-je ? Faut tout de même pas charrier !
    J’avoue cependant une forte sympathie à ceux qui osent soulever le coin des tapis -non par obsession de la coquine poussière, mais bien par conviction que sous la poussière accumulée depuis trop longtemps peut se cacher un fil d’Ariane !
    Et, il arrive que le fil fasse pelote.

    Ben moi, sur la belle « petite maison des 3 petits cochons » sur laquelle je travaille, la modulation des consignes de manière « radicale » (20°C le jour, chauffage en berne la nuit) induit une réduction des besoins de 23% (c’est pas rien; mais pour être performante elle n’est pas « passive » …). Cette modulation nécessite une réserve de puissance de 15 à 50 % selon que l’on est pressé ou non d’accélérer le « poids lourd ».
    Finalement, chaque cas est toujours particulier; l’important serait donc de se méfier des généralités trompeuses.

    Bonne pelote Olivier ! 😉 !

  18. Mmmh… Voyons voir si je peux mieux faire, Alexis. D’abord ce qui différencie énergie et puissance, c’est le temps. Dans mon exemple de casserole, on dépense finalement la même énergie mais on use de puissances différentes.

    Ce qui trouble la compréhension, de vous et d’autres, c’est que dans le cas du bâtiment, j’ai un ennemi extérieur, le froid dehors, mais aussi un ennemi intérieur potentiel, les masses thermiques que l’on laisserait se décharger de leur chaleur. Oublions la puissance, ce n’est pas la cause, c’est une conséquence.

    Cet ennemi intérieur n’existe pas si on ne le laisse pas se refroidir les masses internes (dT = 0 comme dirait Jean-Marie), il y a juste à lutter contre le froid extérieur. Mais si on laisse le bâtiment se refroidir, apparaît un ennemi intérieur qui lui aussi va réclamer des calories au retour de la consigne normale. Dans le cas d’un bâtiment passif avec une forte inertie, il peut arriver que cet ennemi intérieur soit plus gourmand en énergie que l’ennemi extérieur, rendant la réduction de consigne contre-productive. Dans un bâtiment classique, l’ennemi extérieur est toujours plus avide que l’intérieur, on a donc jamais de situation de ce type.

    Voyons si je peux tenter une autre image, géopolitique cette fois. Soit un royaume dont le roi ferait taire les oppositions par quelques soudoiements. Lorsqu’il est dans son territoire, il achète la paix à ses ennemis extérieurs par quelques écus ; chez lui, sa seule présence impressionne et fait taire l’opposition. Lorsqu’il quitte sont territoire, il paie toujours pour que ses voisins n’attaquent pas son pays mais il laisse aussi, par son absence, monter la grogne chez ces sujets. Lorsqu’il revient, il doit maintenant racheter le calme.

    Si ces opposants intérieurs sont plus cupides que ses ennemis frontaliers, alors il veillera à ne pas quitter le pays. Mais si c’est l’ennemi extérieur le plus gourmand, il ne se gênera pas pour aller les rencontrer et les impressionner pour faire baisser le montant du racket. Ben, voilà, imaginez votre thermostat avec une couronne ! 🙂

  19. Voilà, c’est bien cela que je voulais signaler, Jean-Marie, ne tirons pas trop vite de généralités, à la manière du titre de cet article ! De la puissance des simulations aussi…

  20. Je vous remercie pour votre patience 😉
    Mais pourquoi l’ennemi intérieur serait-il différent de l’extérieur? Si je comprends bien, j’ai une cloison interne, si j’abaisse la consigne à 16°, cette cloison va se refroidir comme le reste de la pièce. Et quand je vais chauffer, il faudra que je chauffe l’air + la cloison. C’est bien ça qu’il faut comprendre?
    Si c’est bien ça. J’imagine que pour maintenir une température constante à 19°, il faut que je maintienne l’air à 19° mais également la cloison ce qui me consomme aussi de l’énergie.
    Lorsque je suis en phase de refroidissement. Si la T° de l’air est à 17° et la cloison à 18,5°, la cloison va se refroidir mais elle va se refroidir en donnant de la chaleur à l’air qui se refroidit donc moins vite que s’il n’y avait pas eu la cloison.
    Donc pourquoi l’intérieur, modifierait-il la règle?

  21. Si je comprends bien, j’ai une cloison interne, si j’abaisse la consigne à 16°, cette cloison va se refroidir comme le reste de la pièce. Et quand je vais chauffer, il faudra que je chauffe l’air + la cloison. C’est bien ça qu’il faut comprendre?
    Si c’est bien ça. J’imagine que pour maintenir une température constante à 19°, il faut que je maintienne l’air à 19° mais également la cloison ce qui me consomme aussi de l’énergie.

    Alexis, c’est bien cela, il faut chauffer l’air et les masses thermiques internes. Mais maintenir à 19 °C ces dernières ne coûtent pas d’énergie si le volume interne est à la même température (le fameux dT = 0) ! Ces masses-là ne sont pas en contact avec l’extérieur (d’où leur nom), c’est donc leur réchauffage qui peut consommer de l’énergie, pas leur maintien en température. Elles, elles échangent avec l’air, pas avec l’extérieur.

    1. Je progresse, j’ai appris une chose 😉 Jusque là je pensais qu’un congélateur plein consommait plus à se maintenir en température qu’un congélateur vide. Mais je me rends compte que seul compte la surface de contact.

      Mais pour ce qui est de notre maison passive, j’ai encore besoin d’explications… l’énergie qu’il faudra fournir pour réchauffer les masses interne n’est-elle pas égale à l’énergie que ces dernières ont libérée lorsque l’air ambiant se refroidissait?
      Si c’est le cas, je n’ai pas de surconsommation à rechauffer les masses internes, il s’agit juste d’une chaleur que j’avais récupérée plus tôt dans l’expérience.

      Merci encore pour vos efforts.

  22. Ah non, n’ouvrez pas un nouveau débat-polémique, celui du congélateur (2 050 000 résultats sur Gô.ôgle) ! 😀 Non, vous avez raison, pas de différence de consommation, porte fermée, en régime de croisière, entre un appareil plein ou un vide. Maintenant, selon qu’on ouvre, selon la capacité thermique des denrées, on peut retrouver exactement le même problème qu’ici rhâââ 8-[

    Pour ce qui est de l’énergie restituée/libérée, vous avez également raison. Mais l’idée ici est que l’on a à restituer cette énergie au moment où on l’air lui n’en avait plus besoin (apports gratuits, déperditions moindres). En consigne monotone, on aurait cessé de fournir des calories, ici avec la réduction, on est obligé de re-remplir les masses internes vidées. Mais, je vais regarder de plus près à temps perdu…

  23. Merci pour ces échanges qui me permettent de progressivement mieux comprendre les problématiques de la thermique du bâtiment (et ainsi d’améliorer le pilotage de mes installations ;)).

  24. bonjour

    je me permets une réponse sur un autre plan : la STD est passionnante, l’observation du fonctionnement d’installations réelles ne doit pas être oublié…et j ai qq retours intéressants dans le cadre de suivi d exploit / optimisation énergétique à partager.

    Dans la plupart des bâtiments scolaires (souvent moyennement isolé) ou administratif, j ai pu vérifier concrêtement de fortes économies grace à l’abaissement noturne ou de week end en utilisant les températures de non chauffe en mode réduit et en les fixant à 2 voir 0°C. On trouve ces températures sur les vieux RVL 46 ou alors sur les siemens récents ca doit être les paramètres 51 et 52 : ca signifie qu en période dite de réduit, dès que la température ext est supérieure à 2°C, le chauffage est complètement coupé sur les groupes considérés. Effet immédiat : mois de perte dans le collecteur en chaufferie, moins de perte dans la distribuiton (puisqu elle se refroidit) et éco d’élec puisqu on coupe les pompes de circulation. C’est radical.
    Ensuite lors de la relance, la chaudière tourne plein pot pendant 1 h ou 2 : géniale : elle a un bien meilleur rendement que si elle avait fait x cycles sur 10h ou 48 h avec des pertes par préventilation du foyer.
    Donc quand on considère l ensemble de l ‘installation, les pertes par distribution, les pertes des collecteurs, les pompes de circutation, couper le chauffage (et pas l’abaisser c’est là l erreur !!!) pendant une nuit voir un week end est extrêmement rentable, à condition de bien gérer et anticiper la relance.

    Salutations

    Lionel Robbe

    1. Votre commentaire sur le fonctionnement de grosses installations est très intéressant, merci Lionel ! Attention, cependant — amis lecteurs non avertis 😉 — à bien noter que Lionel évoque de gros bâtiments mal isolés et pas des bâtis passifs pour lesquels on a plus d’installation de chauffage « à l’ancienne ». Et cela peut changer pas mal de choses, par exemple, ici, pour la maison passive, réduction = coupure !

  25. Je viens de découvrir votre blog qui me parait très riche en informations et va s’ajouter à mes favoris.
    Le sujet discuté ici m’intéresse car comme un tas de personnes j’y ai réfléchi depuis longtemps et j’en été arrivé à la conclusion qu’il y avait toujours un bénéfice à réduire la température de consigne lorsque les besoins de confort le permettait. C’est pourquoi les conclusions de votre analyse m’ont surpris, même en admettant qu’elles ne concerneraient que les bâtiments passifs.
    Il me semble que le biais dans votre analyse vient du fait que vous considérez que la température du bâtiment va baisser selon la consigne. Hors la température n’atteindra ce niveau que si les pertes du bâtiment sont suffisantes sur la période de baisse, ce qui manifestement ne sera pas le cas avec une forte inertie. Donc le calcul d’énergie nécessaire à revenir à la consigne haute n’est pas réaliste, à moins de forcer le refroidissement de la paroi inertielle!
    Par ailleurs, il me semble que les apports thermiques « gratuits », solaire en particulier, seront plus efficaces si la température du local est basse. Si l’on prend l’exemple d’un bâtiment inoccupé durant la journée de travail et dont les ouvertures sud sont exposées au soleil, l’apport thermique sera optimisé si la température est plus basse.

  26. Bonjour à tous,
    Tout comme Eric j’ai lu tous vos commentaires et ai ajouté ce site à mes favoris !
    Pour ma part je suis étudiant en licence performance énergétique des bâtiments et j’étudie les bâtiments à basse consommation y compris le passif. Je confirme donc que, dans la plupart des cas, les réduits ne sont économes lorsque le bâtiment est inertiel !
    Par ailleurs, je travaille dans le cadre de mon alternance dans une entreprise d’exploitant de chauffage (concurrent Dalkia et Cofely). J’aimerais pouvoir établir un réduit de température en fonction de l’inertie du bâtiment voire de son isolation (qui a moins d’incidence mais qui doit jouer également) dans le but de réaliser des économies d’énergie et de baisser les consommations de chauffage. Pourriez vous m’aidez en me donnant un ordre d’idée de ces réduits en fonction de ces paramètres? On prend usuellement 2-3°C dans le cadre d’un bâtiment « classique » mais comment ce ratio varie t-il avec l’inertie du bâtiment?
    Note : il n’y a aucun bâtiment passif dans nos contrats donc mes questions se portent surtout sur l’existant collectif et tertiaire qui représente plus de 90% de nos contrats et les bâtiments basses consommations (RT 2005).

    Merci à vous.

    1. Bonjour Pierre,

      Très honnêtement, il est difficile de vous répondre sur les réductions efficaces dans les bâtiments à très basse consommation d’énergie. Parce que – répétons-le bien d’abord ! – dans les bâtiments « classiques », il y a toujours intérêt à réduire la consigne, il faut, en revanche, prendre garde à avoir assez de puissance de chauffage pour ramener le confort dans le temps qui nous est imparti.

      Je juge, pour ma part, de l’efficacité des réductions en analysant mes simulations thermiques. Prenons un exemple :
      Indolence thermique

      Si vous regardez la salle de classe 1, du fait de l’inertie et de l’inactivation partielle de la ventilation, on voit déjà qu’il n’est pas bien utile de prévoir une consigne de moins de 17 °C puisque le bâtiment ne descendra jamais plus bas. Mais, bon si on le fait tout de même, rien de grave. En revanche, il faut tenir compte de cette inertie quand on veut remonter la température parce qu’on ne peut gagner que 1 °C par heure dans cette même salle. Alors si au lieu des 19 °C prévu initialement, vous voulez 22 °C, il va falloir vous y prendre bien à l’avance !

      Le seul conseil que je puisse vous donner, c’est donc d’interroger ceux qui ont conçu le bâtiment 😉

      M’enfin si vous voyez une faible puissance et que vous devinez beaucoup d’inertie, faites attention à la réduction de consigne et demandez-vous si vous laissez assez de temps pour ramener le confort attendu.

  27. Je vous remercie de votre réponse rapide.
    C’est à peu près ce que j’attendais mais comme l’avez dit c’est très difficile d’établir un réduit sans bien connaitre le bâtiment et définir son inertie.
    Ce que j’en retiens c’est qu’il faut absolument une ventilation dans tous les cas de figure.

    Merci je repasserai certainement une autre fois pour quelques questions 😉

  28. Heu, je n’ai pas été clair pour la ventilation. Ce que je disais n’avait à voir qu’avec mon exemple.

    Le premier graphique donne des profils de température sur deux jours et une nuit. J’ai mis le focus (fond blanc) sur une journée, période où la ventilation est active. Le second graphique montre le comportement sur une semaine d’hiver, le focus est maintenant sur la nuit, où la ventilation est programmée dans un mode « hibernation ».

    Le premier graphique permet donc de voir combien le bâtiment rechigne à monter en température, le second combien, il refuse de se refroidir. C’est ce que j’avais appelé de l' »indolence thermique », une qualité particulière que nous avions mis en place ici pour assurer un confort low-tech, sans beaucoup de systèmes ni de régulation.

  29. Ok ok je comprends mieux.
    Et si c’est pas trop indiscret vous utilisez quel logiciel pour cela? Un logiciel de STD comme Pleiades ?

  30. Bonjour et merci pour les infos…

    J’ai une question sur les maisons non passives (la mienne) et la baisse de température pendant les absences. Chaudière gaz, radiateurs acier, têtes thermostatique, isolation correct

    Concrètement, la maison étant vide 5j/7 pendant 10h à heures fixe, est il plus économique de maintenir à 17/18° ou à 5/10° pendant ces périodes?

    Si ça met 2h à monter en température, pas de problème, je peux programmer et gagner 8h quand même.

    Merci.

  31. Bonjour Vincent,

    Pas facile de répondre comme ça avec si peu d’informations, mais sur un projet comme celui-ci http://wp.me/P43RTR-ol, le simple maintien au-dessus de 5 °C en période d’inoccupation divise par deux la facture de chauffage par rapport au maintien du chauffage en permanence. Dans votre cas, il y a sûrement une économie à attendre mais prenez garde à ce que la maison comme le système de chauffage supporte ce fonctionnement et attendez-vous également à de lentes remontées en température, selon la puissance disponible.

  32. Bonjour,

    la conversation a certes commencé il y a deux ans, mais le sujet ne me semble pas encore épuisé.

    Par exemple, je pense que la réponse sur le fait que la réduction peut être plus coûteuse, est comme vous le dites au début, dans la différence de temps entre le refroidissement et le réchauffage. La vitesse à toujours un coût plus élevé, car demande toujours plus d’énergie concentrée ou puissance (enfin, à notre échelle). D’autant plus que le jour, les murs extérieurs bénéficient le plus souvent d’une température plus clémente et d’autant plus clémente s’il fait soleil !

    Donc, le bon rendement me semble de faire le contraire de la plupart de ce qui est dit ici, soit, chauffer plus la nuit et mettre en réduction le jour, en fonction de l’aide ou non du ciel !

    Perso, même par temps froids mais avec soleil, l’intérieur de la cuisine et du salon exposés au soleil, voient leur température grimper allègrement de 2 voir 3 ou 4 degrés assez rapidement. Donc, réduction du chauffage, mais pas de la température ambiante !!!

    Quand on est avec la formule des heures creuses, c’est encore mieux.

  33. On pourrait aussi ajouter qu’avec du chauffage électrique (effet joule, PAC, …), le fait de relancer le chauffage pour remonter en température sollicite les centrales thermiques d’appoint, donc gaz, fioul ou charbon… évidemment, le bilan CO2 global ne s’améliore pas avec un abaissement de température!
    De plus, les chaudières (à condensation) préfèrent travailler à régime réduit, les rendements s’améliorent (car les échangeurs deviennent surdimensionnés) et donc la consommation d’énergie (primaire) s’abaisse.

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